Qui a tué George Floyd ? La question consonne étrangement avec une rengaine de Bob Dylan, de 1963 : who killed Davey More ? Who, why, what was the reason for ? Qui a tué le boxeur Davey More ? Et qui a tué l’ancien boxeur George Floyd ? Oui, qui l’a tué, pourquoi, quelle en fut la raison ? La chanson propose la réponse, la litanie des dénégations « not me…not me… », ce n’est pas moi disent l’arbitre, le manager, la foule… ce n’est pas moi dira sans aucun doute le policier…
Certes nous savons bien tous pourtant que c’est lui, le meurtre fut filmé en direct, que c’est bien Derek Chauvin qui a tué George Floyd, en maintenant 8 minutes durant son genou sur le cou de ce dernier, en dépit de ses supplications. Mais Derek Chauvin ! Peut-on voir dans cet homme qu’on imagine médiocre la cause d’un événement si considérable et qui bouleverse l’opinion mondiale au point de faire presque oublier la crise sanitaire ? Ne faut-il pas incriminer aussi, au-delà de lui, les policiers qui étaient là et qui ne sont pas intervenus ? Et toute la hiérarchie de la police, qui laissa en fonction un homme qui s’était déjà signalé par un comportement gravement inapproprié ? Ou encore, plus encore, Donald Trump dont chaque déclaration ressemble tellement à une provocation à la haine que Tweeter refuse désormais de passer certains de ses messages ? Ou encore cette Amérique, dans son ensemble, si arrogante dans son rôle autoproclamé de gendarme du monde, et où les Noirs sont les victimes de prédilection de la violence sociale, et comme on dit aujourd’hui d’un « racisme systémique », le racisme donc de tous et de personne ?
Ces réponses sont à présent bien connues, répétées sur toutes les antennes de la planète, répercutées et amplifiées par les réseaux sociaux. Ne renvoient-elles pas pourtant au « not me », à la dénégation de la géniale chanson de Bob Dylan ? Ce n’est pas nous, c’est eux, c’est l’Amérique, c’est le « ugly American », l’horrible Américain. « Horrible », le terme est sans doute peu contestable pour toutes les raisons qu’on énumère : mais n’en est-il pas une de plus, celle-là même que l’on tait, et qui est que la culpabilité des autres autorise chacun à se défausser de la sienne, sa part propre dans un racisme qui peut-être ne devient « systémique » que parce que nous permettons qu’il en soit ainsi.
Who killed George Floyd ? Not me ! Pas moi !
Mais vraiment ?
Il est largement temps de ne plus accepter la banalisation du meurtre, ni même de la violence de la part de celles et ceux qui sont censés nous en protéger.
Un très beau texte d’hommage et de reflexion.
Merci
Comment ne pas avoir une pensée, en ce moment, pour Joséphine Baker, une adhérente qui a bâti notre LICRA : “Un jour j’ai réalisé que j’habitais dans un pays où j’avais peur d’être noire. C’était un pays réservé aux Blancs. Il n’y avait pas de place pour les Noirs. J’étouffais aux États-Unis. Beaucoup d’entre nous sommes partis, pas parce que nous le voulions, mais parce que nous ne pouvions plus supporter ça… Je me suis sentie libérée à Paris”
Pierre Pieniek
Merci Pierre, également pour ton commentaire parfaitement ajusté.
Julien Levinger
The Lonesome Death of Hattie Carroll
ALBUM : “THE TIMES THEY ARE A-CHANGING”. – 1964
BALLAD OF HOLLIS BROWN (1963)
ALBUM : “THE TIMES THEY ARE A-CHANGING”. – 1964