Patrice Bilgorai, président de la Licra Nîmes et responsable national des formation police et gendarmerie s’est entretenu avec La Gazette, dans son édition du 22 au 28 octobre 2020.
LA GAZETTE. La Licra a communiqué au niveau national après l’assassinat de Samuel Paty, mais pas la Licra Nîmes. Pourquoi ?
Patrice Bilgorai. Il nous a semblé évident que nous partagions la même horreur et la même émotion que des millions de Français. Et nous étions présents au rassemblement de dimanche devant la préfecture à Nîmes, comme la Licra était présente partout où il y avait des rassemblements en France.
Que représente pour vous l’assassinat d’un professeur ?
S’attaquer à un enseignant, c’est s’attaquer au fondement de la République. Car qui la porte sur ses épaules, si ce n’est l’école ?
Ce meurtre est perpétré après ceux d’un curé et d’un entrepreneur dans des conditions similaires, après les attentats dans une école et un supermaché juifs, un journal satirique, une salle de concerts, pendant un feu d’artifice…
Ce sont tous des signes d’une civilisation à laquelle s’opposent les bourreaux. La république, la démocratie, la liberté d’expression, de conscience, de culte et beaucoup d’autres libertés du monde occidental et de la France sont la cible du fascisme islamiste.
Vous n’hésitez pas à parler de fascisme ?
Comment décrire autrement cette horreur ? Nous sommes aujourd’hui face à un ennemi qui rappelle des heures sombres, on est à l’apogée de la haine. Et elle trouve un écho supplémentaire avec les réseaux sociaux. La dimension n’est plus la même que quand un discours de haine se tenait devant des centaines voire des milliers de gens. Il faut d’autres armes.
Quelles armes ?
D’abord, il faut risposter sur les réseaux sociaux. Ensuite, il y a cette loi sur la levée de l’anonymat quand il y a incitation à la haine sur Internet, elle a été rejetée par le conseil constitutionnel au nom de la liberté d’expression. Bien sûr qu’il faut respecter le droit, mais ne soyons pas naïfs, nous avons face à nous de vrais combattants engagés dans une guerre.
Avec quel but ?
Le rêve des islamistes, c’est de nous imposer la charia. Il y a un désir de totalitarisme qui s’exprime déjà dans certains quartiers. Et notre erreur, c’est d’avoir laissé au Rassemblement national le combat pour la laïcité, sachant que le sien est dirigé contre une religion, l’islam, et que ce n’est surtout pas de ça dont il s’agit.
À l’inverse, certains politiques n’hésitent pas à crier à l’islamophobie en France.
Il y a aujourd’hui une imposture de certains groupes politiques, y compris à gauche, qui tentent de se refaire une virginité après avoir défilé contre la loi de 2004 sur les signes religieux, à l’appel du Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF).
Vous parlez des Insoumis et de Jean-Luc Mélenchon ?
Oui, la Licra a d’ailleurs demandé directement à Jean-Luc Mélenchon de s’exprimer sur son attitude. Il y a aussi des Insoumis très proches des Indigènes de la République, qui est une mouvance raciste. On ne peut pas les qualifier autrement puisqu’ils organisent des ateliers “en non-mixité raciale”. On a vraiment besoin d’une prise de conscience.
Les enseignants se disent peu soutenus et isolés. Que peut faire la Licra ?
La Licra intervient depuis longtemps dans les établissements scolaires. Nous voyons que c’est de plus en plus difficile.
Certains enseignants reconnaissent qu’ils font parfois comme s’ils n’avaient pas entendu ce que disent des élèves, parce qu’ils craignent de ne pas avoir suffisamment d’arguments pour répondre. Dans certains établissements, certaines classes, certains groupes difficiles, je ne suis pas sûr que les enseignants soient suffisamment armés. La Licra peut apporter des réponses en concertation avec eux.
Propos recueillis par Isabelle Bortolin