Découvrez le message de Mario Stasi, président de la Licra.
La Licra n’a pas commenté la mort de Jean-Marie Le Pen. Elle aurait pu le faire abondamment, tant le parcours de l’ancien président du Front national fut jalonné de déclarations détestables, dont certaines lui valurent d’être condamné. La Licra fut à de nombreuses reprises face à lui, sur les bancs des parties civiles. En 2015, alors que Jean-Marie Le Pen continuait de provoquer publiquement pour exister politiquement, Marine Le Pen, présidente du FN depuis 2011, l’excluait du parti.
Elle agissait ainsi conformément à une stratégie de « dédiabolisation », un parti ne pouvant sérieusement briguer le pouvoir en charriant l’antisémitisme. Dans une interview récente, Marine Le Pen a expliqué qu’elle ne se pardonnerait jamais cette décision, au regard de la douleur qu’elle avait causé à son père. Elle a ajouté qu’il était « un peu injuste de le juger uniquement à l’aune de ces polémiques »
Cette indulgence nous interpelle, sans nous surprendre. L’obsession qui fut celle de Jean-Marie Le Pen à l’égard des immigrés, des noirs, des arabes ou des juifs, sa xénophobie, ses saillies racistes et antisémites ne constituèrent pas à proprement parler des « dérapages » ou des « sorties de routes » : elles furent son fonds de commerce. Non pas une haine résiduelle mais bien une dimension structurelle de son engagement
Un chef de parti défend un projet de société. Il a une parole publique, une influence, des responsabilités. Il revient à Jean-Marie Le Pen d’avoir profondément instillé le poison raciste et antisémite dans une partie de l’opinion, trouvant plus réjouissant de diviser les Français que de chercher à les rapprocher dans l’intérêt de la France. Sans doute eut-il d’autres « talents » mais cette passion pour l’exclusion fut assurément sa marque en politique.
Cette attitude ne peut être minorée, pas plus que des obsessions ramenées au rang de simples « polémiques ». Face au racisme et à l’antisémitisme, il n’est d’autre option, pour une ou un responsable politique, que de les condamner et les combattre, sans faillir. Marine Le Pen, qui affirmait il y a peu que le Rassemblement national était le meilleur bouclier pour les Français de confession juive, ne l’a pas compris.
Il est des hommages qui sonnent comme de funestes réhabilitations.