Mais qui est Alphonse de Lamartine ?
Les dix premières années de sa vie, passées dans la campagne bourguignone de Milly, seront principalement influencées par la nature, les femmes (notamment ses sœurs et sa mère) et l’abbé Dumont (curé de Bussières), ce dernier lui insufflant une grande ferveur religieuse, qui sera renforcée plus tard par les lectures de Chateaubriand, Virgile et Horace.
Il commence à écrire de la poésie sous l’inspiration des poèmes d’Ossian, puis, après une aventure sentimentale laborieuse, celui-ci entamera un voyage en Italie (1811-1812) durant lequel il fera la rencontre d’une jeune napolitaine (muse de sa Graziella). Il s’essayera à la tragédie, et écrira ses premières élégies. A son retour à Milly, il y sera nommé maire dès 1812 (à 22 ans) ; seul garçon de sa famille, il devait également recevoir en héritage les domaines de ses parents, mais s’engagera, sans y être obligé, à indemniser ses sœurs par des rentes.
Un partisan du progrès
Pour Lamartine, l’histoire est en marche et les révolutions sont un moyen divin pour atteindre un objectif ; selon lui la démocratie est la traduction politique de l’idéal évangélique. Jocelyn et La Chute d’un ange témoigneront des préoccupations sociales de leur auteur œuvrant notamment pour la paix.
Après moult péripéties, amoureuses et familiales, qui inspireront les plus notables de ces Méditations, il sera nommé secrétaire d’ambassade à Florence en 1825 ; mais s’en verra refuser le poste de ministre de France. Dès 1830, la pensée politique et sociale de Lamartine va devenir un aspect essentiel de son œuvre.
Lamartine se ralliera toutefois à la Monarchie de Juillet ; candidat malheureux à la députation (il échouera dans trois départements). Il écrit Sur la politique rationnelle dès 1832, et sera finalement élu député en 1833 (et ne cessera de l’être jusqu’en 1851). Aussi, à la suite de ses voyages en Orient il deviendra, avec Victor Hugo, un des plus fervents défenseurs de la cause du peuple serbe (dans sa lutte contre la domination de l’Empire ottoman). En juillet 1833, lors de sa visite de Niš (en Serbie), Lamartine, devant la tour des crânes, s’écria :
« Qu’ils laissent subsister ce monument ! Il apprendra à leurs enfants ce que vaut l’indépendance d’un peuple, en leur montrant à quel prix leurs pères l’ont payée »
Légitimiste en 1820, il évoluera peu à peu vers la gauche, mais voit un danger dans la disparition de la propriété : cette position ambiguë, qui lui inspire la création d’un « Parti social » en 1834, sera intenable. En décembre 1834, il fera partie des fondateurs de la Société française pour l’abolition de l’esclavage.
“Vous en êtes resté à la Liberté, j’en suis à la Fraternité !”
Dans les années 1840, l’économiste Frédéric Bastiat, qui entretenait de bons rapports avec Lamartine, admirant l’écrivain, lui reprochera son incompréhension de l’économie, et des positions paradoxales, voir ambiguës. Dans une lettre à Bastiat, Lamartine écrit : « Votre doctrine n’est que la moitié de mon programme ; vous en êtes resté à la Liberté, j’en suis à la Fraternité. », l’intéressé répondit : « La seconde moitié de votre programme détruira la première. » ; puis développa ses arguments dans son pamphlet La Loi.
À partir de 1843, il connaîtra de graves soucis financier. En 1847, réunissant à Cormatin, dans le château d’un ami, tous ses soutiens politiques, il y rédigera son programme « républicain et socialiste ». Il se déplacera lentement vers la gauche du paysage politique au fil des années, allant jusqu’à devenir la tête de file des révolutionnaires de 1848. Son Voyage en Orient et son Histoire des Girondins lui redonneront une grande popularité, ainsi que ses discours à la Chambre qui manifesteront une certaine inflexion de sa pensée politique.
En 1848, à l’occasion de la chute de Louis-Philippe et de la proclamation de la Seconde République, Lamartine fera partie de la Commission du gouvernement provisoire ; nommé ministre des Affaires étrangères de février à mai 1848. Partisan d’une révolution politique, il restera plus proche des libéraux que des partisans d’une réforme politique et sociale ; le 24 février 1848, il s’opposera strictement à l’adoption du drapeau rouge. De concert avec François Arago, il mènera une politique modérée. C’est Alphonse Lamartine qui signe le décret d’abolition de l’esclavage du 27 avril 1848. Au second semestre 1848, il occupera la chaire de droit international d’histoire des traités de l’éphémère École d’administration. En décembre, Lamartine n’obtiendra que 0,26 % des voix lors de l’élection présidentielle qui portera au pouvoir Louis-Napoléon Bonaparte, futur empereur.
La fin de la vie de Lamartine sera marquée par des problèmes d’argent. Il fera de l’alimentaire pour vivre, et la qualité de ses œuvres s’en ressentira ; moqué pour ses souscriptions à répétitions et ses œuvres de circonstance (surnommé « tire-lyre »), oublié du monde politique, il prophétisera la carrière politique d’Émile Ollivier (qui lui succédera d’ailleurs à l’Académie française). À la fin des années 1860, ruiné, il sera obligé de vendre sa propriété de Milly, et acceptera l’aide d’un régime qu’il réprouve mais qui le loge gracieusement à Paris ; dans un chalet du Bois de Boulogne situé au bout de l’actuelle avenue Henri Martin. C’est là, au 135 avenue de l’Empereur, non loin de l’actuel square Lamartine, qu’il mourra en 1869.
Victor Hugo présentera l’homme comme :
« Noble, tranquille, généreux, tout entier au pays, poussant le patriotisme jusqu’au dévouement, et le dévouement jusqu’à l’abnégation. »