Les faits
Le 5 décembre 1986, il est presque minuit lorsque trois voltigeurs prennent en chasse Malik Oussekine, qui sort d’un club de jazz, rue Monsieur-le-Prince. Il croise alors Paul Bayzelon, jeune fonctionnaire au ministère des Finances, qui rentre chez lui, au numéro 20 ; celui-ci lui ouvre la porte du hall.
Tous deux viennent d’entrer dans le hall quand un des policiers parvient à se glisser à l’intérieur et ouvre à ses deux collègues. Selon Paul Bayzelon, les trois CRS rouent directement de coups de pied et de matraque Malik Oussekine, tombé à terre, qui clame pourtant son innocence. Lorsque Paul Bayzelon tente de venir en aide au jeune homme, il recevra également des coups de matraque. Un autre témoin décrira « des taches de sang sur les murs et des éclats de verre des plaques de boîte à lettres – brisées ». Dix minutes plus tard, le SAMU, arrive pour apporter les premiers soins, puis transporte Malik Oussekine aux urgences de l’hôpital Cochin, où il sera déclaré officiellement décédé à 3 h 20.
En réalité, le rapport du médecin régulateur du SAMU révèle 4 jours plus tard qu’il avait rendu son dernier souffle, dès minuit, dans le hall de l’immeuble. Malik a été transporté à l’hôpital pour tenter d’éviter le scandale. Cette information sulfureuse sera divulguée par l’avocat de la famille de Malik Oussekine, Georges Kiejman, le 9 décembre, à la veille de l’annonce de la deuxième vague de marches silencieuses.
Malik Oussekine est enterré au cimetière du Père-Lachaise à Paris (division 75), depuis le 10 décembre 1986.
Le respect de la mémoire
Plus d’un an plus tard, un bulletin local du Front national aurait écrit le 20 janvier 1988, que : « des Français comme les Oussekine, on peut s’en passer ». Un outrage ignoble qui illustre l’aversion profonde que les officines d’extrême-droite nourrissent à l’égard de nos concitoyens qui ne seront jamais assez français à leur yeux.
« Après la parodie de procès […], je me suis rendu compte que, dans ce pays qui est le mien, où je suis née, je serai toujours une citoyenne de deuxième zone », déclarera bien plus tard la sœur de la victime, Sarah Oussekine.
Nous existons pour défendre un idéal, celui de l’universalisme, par l’action et la pédagogie. Nous luttons contre la discrimination, partout où elle se trouve, pour que jamais plus des Français, quelle que soit leur origine ou leur confession, n’aient à souffrir d’un tel sentiment ; il n’y a pas, et il ne doit pas y avoir, de citoyens de « deuxième zone ».
Nous n’oublions pas. Nous n’oublierons jamais.