À Londres, le 8 avril 1971 s’ouvre un évènement inédit : le 1er congrès international des Roms. Si des congrès nationaux se tenaient dans beaucoup de pays d’Europe depuis le début du XXème siècle, il a fallu attendre la création du Comité International Tzigane en 1965 pour franchir les frontières. En ouverture des travaux, le président de séance ouvre les travaux et trace les perspectives d’aboutissement de ce rassemblement historique : « Le but de ce congrès est d’unifier les Roms et de susciter leur action dans le monde entier ; d’amener une émancipation en accord avec notre propre intuition et nos idéaux – de progresser au rythme qui nous convient (…). Ce sera Romano Drom, notre route tzigane.
Le premier point mis en débat porte sur une question essentielle : comment se nommer aux yeux du monde ? Tziganes, Zigeuner, Gitanos, Gypsies ne font pas l’unanimité et sont rejetés. Le consensus se fait autour de « Rom ». Le Congrès se dote d’une organisation politique, d’un organe exécutif, d’un drapeau bleu et vert avec une roue de couleur rouge, d’un slogan – « Le peuple Rom a le droit de rechercher sa propre voix vers le progrès » – et un hymne.
Ce congrès fondateur marque une étape décisive dans l’affirmation de l’identité d’un peuple rejeté, discriminé, en partie exterminé durant la Seconde guerre mondiale, et qui désormais revendique le droit d’une minorité sans frontières, sans territoire, transnationale, sans armée et sans Etat. Cette identité se résorbe aussi dans cette culture de la diaspora – bien plus que le prétendu nomadisme qu’on leur prête, bien souvent à des fins politiques. Une diaspora qui forme le lien d’une communauté au sein de laquelle les distances ont été affanchies.
Aujourd’hui, la discrimination à l’égard des Roms est celle qui est le plus partagée, très majoritairement, en Europe. Victimes de politiques répressives par les régimes populistes d’Europe centrale, ils sont aussi, par poussées de fièvres épisodiques, les victimes de la vindicte lorsqu’elle surgit à la faveur de tel ou tel fait divers. La rumeur de Roms enlevant des enfants dans une camionnette blanche, en Seine-Saint-Denis, en 2019, a donné des lieux à des expéditions punitives et des violences collectives reposant sur une seule réalité : le racisme.