Au milieu de la soirée, le nom du meilleur acteur élu par l’Académie tombe : il s’agit de Marlon Brando pour son interprétation magistrale du Parrain réalisé par Francis Ford Coppola. La musique lancinante de Nino Rota retentit dans la salle pour accompagner l’hommage mais Marlon Brando n’est pas venu, et pour cause. A l’appel de son nom, une jeune fille se lève et monte sur scène. D’un geste poli, elle décline la précieuse statuette que lui tend l’acteur Roger Moore. Le jeune actrice indienne prend alors la parole :
Le soir même, la presse reçoit une longue lettre de Marlon Brando qui dénonce les préjugés et le racisme à l’égard des Amérindiens véhiculés dans le cinéma américain : « Je pense que (…) la communauté du cinéma a été aussi responsable de la dégradation de l’Amérindien et se moque de ses qualités, le décrivant comme sauvage, hostile et diabolique. Il est déjà assez difficile pour des enfants de grandir dans ce monde. Lorsque les enfants des Indiens regardent la télévision, et ils regardent des films, et quand ils voient leur race, comment elle est représentée dans les films, leurs esprits sont blessés, de ces manières que nous ne pourrons jamais connaître. ».
Cette prise de position intervient alors que l’American Indian Movement, mouvement pour les droits civiques des Natifs Américains aux États-Unis, occupe la réserve indienne de Pine Ridge près de Wounded Knee, afin de protester contre la politique du gouvernement fédéral à l’intérieur de la réserve. Le siège durera 71 jours avant que les militants ne se rendent le 8 mai.Victimes de l’expansionnisme des européens justifié au XIXIème siècle par La Destinée Manifeste, réduits en esclavage et affamés durant des décennies, dépossédés de leurs terres, les Amérindiens ont été victimes d’une véritable discrimination d’Etat, déplacés et parqués dans des réserves, n’accédant de plein droit à la nationalité américaine qu’en 1924.