Le “Collectif contre l’islamophobie en France” (CCIF) se complait, au nom du communautarisme et du concept « d’islamophobie », à mélanger antiracisme et défense du dogme religieux. Son rapport d’activité 2017 est, de ce point de vue, un morceau d’anthologie où l’amalgame dispute à la banalisation, le tout baignant dans une hostilité constante à l’égard de la laïcité.
« L’islamophobie d’Etat »
Le CCIF a eu cette année un grave problème. Alors que les actes de racisme anti-musulmans ont baissé, ce dont chacun ne peut que se féliciter même si leur nombre demeure beaucoup trop élevé, la justification du postulat « islamophobe » devenait moins évidente. Pour faire face à cette situation, l’association prétendument antiraciste a trouvé un nouveau cheval de bataille : “l’islamophobie d’Etat”.
Les mesures administratives de l’état d’urgence sont ainsi dénoncées comme la marque d’une « islamophobie sécuritaire » qui « s’exprime au nom de l’anti-terrorisme et de la lutte contre la radicalisation, en utilisant les moyens de l’Etat pour perquisitionner, assigner à résidence, ficher, surveiller et punir des personnes dont l’islamité constitue désormais un risque subjectif, en l’absence de criminalité objective ».
Il y aurait donc en France un plan concerté contre les musulmans qui utiliserait la lutte contre le terrorisme pour donner libre cours à une « islamophobie d’Etat ». A aucun moment, le CCIF ne met son réquisitoire contre l’Etat – à qui il demande des excuses – en rapport avec la réalité très simple des résultats produits par l’état d’urgence qui vise des terroristes et non pas des individus parce qu’ils sont musulmans : 4000 perquisitions, saisie de 600 armes dont 77 armes de guerre, 95 assignations à résidence. Aucune mention non plus du très faible nombre des mesures prises au titre de l’état d’urgence ayant été annulées par le Conseil d’Etat. Le seul fait que certaines l’aient été constituant au demeurant la meilleure preuve du fonctionnement de notre Etat de droit.
Minimisation et relativisme
Sous la plume d’Ibrahim Bechrouri, doctorant à l’Université Paris 8, on apprend dans ce même rapport que les attentats terroristes sont un véritable fléau mais qu’en comparaison des autres raisons qu’il y a de mourir dans notre pays, il faudrait regarder tout cela avec du recul. Morceau choisi : « Il faut également souligner que le terrorisme, acte meurtrier nullement lié à un jihad culturel qui se minerait sur les plages de France, a fait 238 morts en France depuis janvier 2015. Sans minimiser le sort de ces victimes et l’horreur qu’évoquent les circonstances de leur mort, il est nécessaire de mettre cela en parallèle avec le fait qu’en France, sur la seule année 2015, 497 personnes sans domicile sont mortes dans la rue et que le nombre réel de ces morts, difficiles à comptabiliser, est estimé par l’Institut national de la santé? et de la recherche médicale (INSERM) à 2700 ou 2800 ».
On frémit à l’idée que l’auteur de ces lignes n’ait rien voulu minimiser. À la lecture de cette argumentation, plusieurs questions demeurent en suspens : à qui bénéficie cette comparaison entre les nombre de victimes du terrorisme et de la grande pauvreté ? À quoi bon vouloir relativiser de cette manière le poids des attaques terroristes ? Chacun se fera son idée.
Ambiguïtés et victimisation
Autre fait marquant dans le rapport annuel du CCIF : le ressort victimaire. Parmi les actes « islamophobes » recensés figurent des « refus de soin », sans autre forme d’explication. On ne saura donc pas s’il s’agit de médecins qui ont refusé de soigner un patient parce que musulman, ce qui constituerait non seulement le délit de discrimination à l’égard d’un individu à raison de sa religion mais aussi un manquement aux obligations déontologiques du corps médical. Ou alors de médecins ayant à faire face à des individus exigeant, pour des raisons religieuses, un médecin de sexe féminin pour soigner leur épouse, ce qui, chacun en conviendra, est singulièrement différent. Ce dernier cas montre l’impasse à laquelle conduit le concept d’islamophobie : celle qui consiste à expliquer à un musulman qu’il est victime de discrimination parce que les règles sociales, communément partagées, ne coïncident pas avec son dogme religieux.